et maintenant, qu’est-ce qu’on mange ? (fin du monde 3)

Foncièrement optimiste, je vais supposer que quelques uns d’entre vous ont survécu à la fin du monde. J’imagine que la question qu’ils se posent dorénavant est: mais qu’est-ce qu’on va bien pouvoir manger au réveillon, maintenant que le Carrefour a été rayé de la carte ? Il va falloir essayer de chasser et cueillir un peu. Voici en tout cas ce qu’il ne faut pas faire…

J’aimerais ici répondre à un courrier des lecteurs reçu à l’occasion d’un article écrit pour le HS spécial fin du monde de Science et vie :

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L’exercice de cet article consistait à imaginer à quelles conditions un petit groupe de survivants aurait des chances de redémarrer une humanité. Je me suis interdit d’imaginer quoi que ce soit. Tout ce qui figure dans cette “fiction raisonnée” provient directement des travaux et idées de chercheurs de plusieurs disciplines (écologie, génétique, anthropologie, médecine, linguistique, démographie etc.). Le passage qui a fait réagir mon lecteur avait trait à l’alimentation :

Dans notre nouvel environnement, manger cru serait fatal : les femmes cesseraient sans doute d’ovuler ; la carence énergétique obligerait à absorber une quantité de nourriture à laquelle notre système digestif n’est pas adapté. La cuisson nous permettra en plus d’éliminer les dizaines de composés secondaires toxiques que les végétaux opposent aux prédateurs et de mieux assimiler l’amidon dont sont riches les tubercules que l’on trouve ici communément.

Voici la réaction du lecteur, in extenso :

ça m’a bien fait rire ! J’ai des amies crudivores à 100% et si, bien sûr, elles ovulent, et elles ont même des enfants ! S’il fallait manger cuit pour ovuler, il n’y aurait aucun animal sur terre, pas même des hommes, qui n’ont maîtrisé le feu et la cuisson que très tard dans leur histoire depuis l’apparition de leur espèce. D’où vient cette idée saugrenue qu’une femme n’ovule pas quand elle mange cru ? Avez-vous des preuves scientifiques de ce curieux phénomène ? Il existe sur Terre une infinité de climats et d’environnements très variés dans les quels des animaux sauvages, y compris des primates, mangent cru et ovulent. Manger cru est la règle universelle dans le monde sauvage, dont nous sommes issus, depuis des millions d’années et sous tous les climats, et seul l’espèce humaine y déroge depuis peu, au sens de son évolution génétique, en cuisant ses aliments. On se demande pourquoi revenir à une règle biologique universelle serait fatal ? D’ailleurs, cuire de la cigüe ou des amanites phalloïdes n’a jamais enlevé leur caractère toxique. D’autre part, je n’ai jamais remarqué que mes amis crudivores manquent d’énergie, au contraire. Les animaux sauvages, qui mangent cru, ne manquent pas non plus d’énergie.


La confusion intellectuelle est telle que je ne saurai la débrouiller entièrement. Je vais tout de même essayer de clarifier quelques points qui me dérangent particulièrement, dont un argument employé par tous les adeptes des ‘régimes’ à la mode et qui relève de la tromperie.

Un mot sur les confusion de catégories, d’abord. Placer le signe égale entre un individu ou quelques uns (“j’ai des amies crudivores”) et l’espèce Homo sapiens relève de l’induction un tantinet précipitée. C’est un peu comme si mon lecteur, un chapelet de saucisses  autour du cou, traversait indemne l’enclos aux tigres et en concluait que les tigres sont végétariens (c’est avec grand plaisir que je lui suggérerais alors de retenter l’expérience, pour voir). La deuxième confusion consiste à comparer les conditions d’existence de notre société moderne (avec ses chouettes magasins Naturalia, ses compléments alimentaires, ses gentils nutritionnistes, etc.) et celles régissant l’existence des premiers chasseurs-collecteurs (qui guide le scénario post-apocalyptique de l’article).

Ceci posé, qu’en est-il des conséquences du crudivorisme, en particulier sur la fertilité ?

Je vais vous livrer l’avis de Michel Raymond, qui dirige l’équipe de Biologie Evolutive Humaine à l’Institut des Sciences de l’Évolution de Montpellier : “Sans feu pour cuire les aliments, c’est condamné d’avance.” Bon, histoire d’alimenter un peu (ha ha), précision que les risques d’aménorrhée (arrêt des menstruations) partielle ou complète ont été documentés il y a maintenant un bout de temps par une étude allemande (Koebnick C., Strassner C., Hoffmann I., Leitzmann C. Consequences of a long-term raw food diet on body weight and menstruation: results of a questionnaire survey. Ann. Nutr. Metab. 1999;43:69-79.) qui a observé que 30% des femmes qui suivaient un régime crudivore souffraient d’aménorrhée ! Je ne pourrais décrire les mécanismes précis, mais cela est étroitement lié à la perte de masse graisseuse (on observe aussi des aménorrhée dans les cas d’anorexie,) et diverses carences alimentaires entrent sans doute aussi en ligne de compte  (vitamine B12, calcium, vitamine D, zinc…). Il n’est pas difficile d’imaginer que cette diminution de la fertilité serait fortement aggravée dans un contexte post-apocalyptique et conduirait l’espèce vers son extinction à toute vitesse.

Élargissons maintenant la question aux “règles biologique universelles” de mon lecteur, quoi que cela puisse signifier dans son esprit. La seule règle que l’on puisse définir est qu’il existe dans la nature une quantité invraisemblable de régimes alimentaires et que chaque espèce possède le sien et y est tenue. Mon lecteur peut toujours essayer d’adopter le métabolisme d’une bactérie oxydant le soufre, ou de nourrir ses tigres avec du quinoa s’il veut mesurer les conséquences d’un changement brutal de régime alimentaire.

 

Grotte de Wonderwek ; Homo erectus y maîtrisait le feu voici 1 millions d'années

J’ai déjà évoqué le sujet à propos du prétendu “régime paléolithique”. Si l’on doit définir un régime pour sapiens, c’est fondamentalement celui d’un frugivore omnivore attiré vers les nourritures les plus riches et les plus gustatives. La viande en fait partie. Et la cuisson aussi. Afin d’enfoncer le clou sur le sujet, mentionnons que les traces de foyer incontestables les plus anciennes ont été retrouvées en 2012 dans la grotte de Wonderwerk, en Afrique du Sud. Ce feu serait l’oeuvre de Homo erectus et daterait de 1 millions d’années. La maîtrise du feu est ensuite documentée pour toutes les espèce d’Homo. Imaginer que l’on ait maîtrisé le feu, mais par pour faire cuire des aliments est bien entendu absurde. L’avantage de la cuisson a maintes fois été répété (qualités gustative, élimination d’une partie des composés secondaires toxiques des végétaux, apports caloriques augmentés). Rappelons que le cerveau requiert 22 fois plus d’énergie qu’un équivalent en masse musculaire, que la taille relative de notre cerveau est précisément une caractéristique du genre Homo et que le crudivorisme est déconseillé pour les enfants et les femmes enceintes pour cette raison. Ajoutons que l’ethnologie n’a jamais observé ce mode d’alimentation dans aucune société traditionnelle. Et, enfin que les grands singes eux-mêmes préfèrent manger cuit si on le leur propose (Wobber V, Hare B, Wrangham R., Great apes prefer cooked food., Journal of Human Evolution, Volume 55, Issue 2, August 2008, Pages 340–348).

Il est donc rigoureusement faux d’avancer qu’un régime cru – ou sans viande – serait ‘naturel’ pour Homo sapiens – c’est l’argument marketing que je souhaitais dénoncer : meilleur pour votre ligne, pour la planète ou pour les animaux, si vous voulez, mais ‘naturel’, non. C’est exactement le contraire : notre espèce a toujours mangé de la viande et cuit ses aliments. Elle est adaptée depuis toujours à ce mode d’alimentation, et ce n’est qu’avec l’avènement de la nourriture industrielle que ce mode d’alimentation lui pose des problèmes de santé incontestables. Adopter un régime cru ou sans viande n’est pas revenir à quelque chose de naturel mais équivaut carrément à adopter le régime d’une autre espèce !

Je laisserai la conclusion à Michel Raymond (dont je recommande en passant la lecture de Pourquoi je n’ai pas inventé la roue, dont est tirée cette citation) : “ce type de régime alimentaire est basé sur une idéologie dénuée de tout support scientifique”. Allez, à table, maintenant.

 

quelques menus problèmes de peau (hs#9 : SLAYER, Dead Skin Mask)

C’est la rentrée, le bLoug est prêt à utiliser la terreur pour que vous l’ayez dans la peau : Welcome to Plainfield, Wisconsin, en compagnie d’Ed Gein, le boucher du Wisconsin, suavement hurlé par Slayer dans Dead Skin Mask. Et si ça ne suffit pas, on rajoutera des bactéries dévoreuses de chair !

headbanging science (la rubrique musicale des titres qui ont (presque) un rapport avec la science) : #9 : SLAYER – DEAD SKIN MASK


Tirée du Unholy Alliance Tour, tournée annuelle nord-américaine et européenne ayant Slayer pour tête d’affiche (et à laquelle a participé Mastodon, notre précédent HS), cette vidéo de Dead Skin Mask vous invite à vêtir vos plus beaux atours nécrophiles. Ce classique du combo de Huntington est paru en 1990 sur l’album Seasons in the Abyss, prétendant au titre de meilleur album du groupe. Pas de clip rigolo cette fois-ci, mais peu importe : Slayer à l’étrange talent de sonner mieux live qu’en studio, une rareté pour un groupe de thrash.

Marketé stupidement groupe le plus violent du monde, Slayer est un habitué des controverses en raison, notamment, de thématiques pas franchement consensuelles : satanisme, religion, guerre et Holocauste… Le groupe aurait même été mis à profit pas l’US Army en Iraq pour tenter d’effrayer les troupes de Saddam Hussein – ou essayer de les rendre sourdes ? Ici, point de tintouin, nous sommes dans le doux domaine de la décoration d’intérieur… Enfin, pas n’importe laquelle. Celle, très particulière de Ed Gein, aka “le boucher de Plainfield”, un des tueurs en série les plus marquants de l’histoire des Etats-Unis… Pas forcément pour de bonnes raisons.

La maison des horreurs, 50 ans avant l’invention de Damidot

Plainfield, Wisconsin. 640 habitants. Une sorte de désert rural boisé et plat comme une limande (dont le bLoug vous a appris qu’elles pouvaient être meurtrières) émaillé de granges sinistres aux allures de nids de serial killers. Le 16 novembre 1957, jour de l’ouverture de la chasse au cerf, disparaît Bernice Worden, 58 ans, boutiquière de son état. Les policiers trouvent du sang sur le sol de son magasin ainsi qu’une cartouche vide et constatent l’absence de la caisse enregistreuse. Sur le comptoir, une facture pour de l’antigel, au nom d’Edward Gein.

Edward Theodore Gein, né le 27 août 1906 à La Crosse, non loin de Plainfield, est une sorte de vieux garçon solitaire un peu étrange mais gentil (on lui confie du baby-sitting…). Il est aussitôt arrêté, d’abord pour vol. La police se rend dans sa ferme, située sur un terrain isolé de 80 hectares entouré de bois et de champs. A l’intérieur, il fait sombre, la nuit est tombée et la ferme ne possède pas l’électricité. La police découvre des pièces impeccablement rangées – en réalité sanctuarisées en hommage à sa défunte mère -, à l’exception de la cuisine et de la chambre de Gein, remplies d’un invraisemblable bric-à-brac pourrissant et empestant, interdisant presque que l’on s’y déplace.

la cuisine d’Ed Gein, un sens très particulier de l’ordre

En inspectant la cuisine avec sa lampe torche, le shérif découvre, pendue à l’envers à une poutre, une carcasse décapitée, éventrée et vidée. Pas vraiment celle d’un cerf. Il vient de retrouver Bernice Worden. Du moins une partie.

ceci n’est pas un cerf

Plus de moyens (générateur et lampes à arc) permirent ensuite à la police de faire la lumière les lieux. L’inventaire macabre de leurs découvertes est des plus singuliers. Bernice Worden retrouva sa tête (la police trouva également celle, desséchée, de Mary Hogan, la première victime officielle de Gein, disparue trois ans plus tôt), mais aussi son coeur, dans un sac plastique, et ses entrailles, recouvertes par un vieux costume. D’autres trophées, plus anciens et appartenant manifestement à d’autres victimes, complétaient la déco très tendance des lieux :

  • un haut de crâne faisant office de bol,
  • des abat-jours et une corbeille à papiers en peau humaine,
  • un fauteuil lui aussi en peau humaine,
  • un lit décoré avec des crânes,
  • neuf sexes de femmes décorés dans une boîte à chaussures,
  • une ceinture faite de mamelons,
  • des masques de peau remplis de chiffons pour figurer des têtes réduites,
  • quatre nez,
  • deux vagins “frais”
  • un squelette enterré dans le jardin
  • un costume entier en peau humaine, équipé de jambières de seins et d’un sexe féminin.

En un temps (heureux) où M6 D&co et autres consternants massacres d’intérieur n’existaient pas, le tableau était choquant. La demeure, intitulée la “maison des horreurs”, va faire les gros titres de Time et de Life. L’Amérique des années 50 va se passionner pour ce cas intrigant. Gein avouera le meurtre des deux femmes précitées ainsi que la mutilation de plusieurs cadavres, également féminins, déterrés dans le cimetière local. Il fut déclaré irresponsable de ses actes et interné dans un hôpital psychiatrique du Wisconsin.

Même pas un serial killer, encore moins un serial queer

Techniquement parlant, Gein n’est pas un tueur en série puisqu’il ne fut reconnu coupable que de deux meurtres – il est toutefois probable qu’il en ait d’autres à son actif, à commencer par celui de son frère aîné Henry, qui s’opposait à la vénération de Ed pour leur mère tyrannique, Augusta, et qui fut retrouvé mort en 1944 dans des circonstances mystérieuses.

Médicalement parlant, bien que “la goule de Plainfield” soit devenue un des cas les plus documentés de l’histoire criminelle, sa description est généralement erronée. En cause, la médiatisation très forte au moment des faits, puis le passage à la postérité à travers les oeuvres cinématographiques qu’il inspira, au premier rang desquelles Psychose, d’Alfred Hitchcock, à travers le personnage de Norman Bates, et Le silence des agneaux de Jonathan Demme, via celui de Buffalo Bill (Leatherface de Massacre à la tronçonneuse étant pour sa part un cousin plus lointain).

 

la maison Bates, cousine de celle de Gein ; Psychose est basé sur un livre de Robert Bloch qui prend quelques largesses avec les faits

 La revue Jump Cut, qui analyse les médias sous l’angle de la représentation des classes, des races ou des genres, a publié en 2000 un article qui décortique de façon très documentée les contresens du cas Gein. Le texte cherche à combattre les préjugés qui poussent à placer le signe égal entre homosexualité /  travestissement / transsexualisme et psychopathologie meurtrière (le personnage de Buffalo Bill étant l’aboutissement outrancier de ce préjugé là où Norman Bates restait plus introverti). Au-delà de ce militantisme, il montre comment la postérité réduisit à tort Gein à un travesti nécrophile (voire cannibale).

Parmi les déformations imputables à l’emballement médiatique de l’époque, la déclaration à la presse du procureur Earl Kileen spéculant que le corps de Bernice Worden avait été mutilé et que son cœur avait été découvert dans une casserole sur le poêle firent pour longtemps de Gein un cannibale (cette inexactitude est présente sur de très nombreux sites qui lui sont consacrés ; on y trouve aussi mention d’un frigo alors que la ferme n’avait pas l’électricité). Le magazine Life claironna pour sa part que Gein voulait devenir une femme. Ceci seulement deux semaines après son arrestation, soit avant que tout profil psychologique ait été officiellement établi. Les auteurs qui écrivirent ensuite sur lui relayèrent le pseudo désir qu’avait Gein de changer de sexe et de devenir une femme ; ils extrapolèrent à partir de faits inexacts. Les interrogatoires menés par la police allèrent un peu vite en besogne et furent certainement pour beaucoup à l’origine de ces mésinterprétations sur les désordres sexuels de Gein. Les retranscriptions montrent en effet que celui-ci, fortement influençable et éprouvant des difficultés à dissocier ce dont il se souvenait et ce qu’on lui rapportait, se livrait à une sorte de ni oui ni non involontaire, apportant des réponses qui allaient dans le sens de ce qu’on lui suggérait.

Ed Gein, le vrai

son alter ego cinématographique du Silence des agneaux

Pour l’article de Jump Cut, les projections des fantasmes de l’époque sont probablement à l’oeuvre dans ces interprétations hâtives. En cette fin des années 1950, la catégorie nouvelle du “psychopathe sexuel” se cristallise dans la société et Gein est du pain bénit pour les profileurs de tous poils. Travestissement et transsexualisme sont également des sujets chauds pour la justice et la psychiatrie de cette époque. Plus largement, la société américaine s’interroge alors fortement sur l’homosexualité et sur le rôle de la mère dans cette « déviance » : trop ou pas assez d’affection pour son rejeton pouvait en faire un inverti efféminé. De façon caractéristique, le rôle d’Augusta Gein, une absurde grenouille de bénitier profondément misandre est constamment mis en valeur dans la littérature sur Gein – il est vrai que son cas est particulièrement gratiné. Mais comme le pointe l’article, jamais aucun mot sur l’absence du père, bon à rien décédé tôt et totalement méprisé par Augusta.

Même aujourd’hui, le cas Gein reste semble-t-il délicat à diagnostiquer, tant fiction et faits sont enchevêtrés. Les interprétation freudiennes à base de complexe d’Œdipe qui aurait poussé Gein à vouloir changer de sexe pour résoudre son conflit avec sa mère adorée furent promptement balayées. Le “boucher fou” fut diagnostiqué comme un schizophrène présentant des symptômes aigus de travestissement, de fétichisme et de nécrophilie. Les expertises psychiatriques actuelles valident la schizophrénie mais certainement pas la nécrophilie. Gein nia du reste toute activité sexuelle avec les cadavres dont il détestait l’odeur. Aucun rapport récent ne le décrit non plus comme un travesti.

Quelle que fut sa pathologie, c’est bien tranquillement que Edward Gein mourut, en 1984, à l’âge de 78 ans, au Mendota Mental Health Institute (Wisconsin), l’institut de gériatrie où il avait été placé 6 ans auparavant. Il y coulait de jours heureux, véritable patient modèle… dont la seule bizarrerie était de regarder fixement les infirmières… Cause du décès ; insuffisance respiratoire. Pas de chance, a cette date, Tom Araya, chanteur et bassiste de Slayer, ex-thérapeute respiratoire, avait cessé ses activités médicales et englouti ses maigres économies dans l’autofinancement du premier album du groupe. Faute de secourir Gein, nul doute qu’il aurait aimé faire la causette avec lui, le thème des tueurs en séries étant sa marotte et un sujet d’inspiration pour ses textes (on pourrait aussi lui conseiller le cas Efren Saldivar : soupçonné d’au moins 50 meurtres, ce thérapeute respiratoire (!) californien fut surnommé Angel of Death… par ailleurs titre d’un des classiques de Slayer qui fait référence à Joseph Mengele… histoire de boucler la boucle des coïncidences du petit monde des atrocités, il se trouve que celles commises par les nazis dans les camps inspirèrent Gein, friand lecteur ; il eut peut-être à lire l’histoire de Ilse Koch, “la chienne de Buchenwald”, qui fut traduite devant un tribunal militaire américain à Dachau le 11 avril 1947 ; parmi les pièces à conviction : trois morceaux de peau tatouée ayant fait office d’abat-jour et une tête réduite…).

Dead skin arm

Le problème des histoires d’horreur c’est qu’on a toujours un peu peur, malgré soi, qu’elles nous arrivent en réalité, si fantastiques soient-elles. C’est sans doute ce que doit méditer Jeff Hanneman, cofondateur et guitariste de Slayer, plongé véritablement dans ce qui pourrait être une des chansons cauchemardesques du groupe. Son titre : Dead Skin Arm. Sans éprouver forcément beaucoup de sympathie pour Hanneman (pas innocent dans la mauvaise image du groupe en raison d’un goût douteux pour la Wehrmacht illustré par les noms consternants donnés à ses chiens : Prussia et Rommel), il est difficile de ne pas compatir à l’épreuve qu’il traverse depuis février 2011 : le voilà dévoré par des bactéries “mangeuses de chair” !

quoi fasciste ? mais puisque je vous dis que… ah fasciite… merde, c’est quoi ce truc ?

 

Fasciite nécrosante. C’est le petit nom de la maladie heureusement rare qui frappe le guitariste au bras droit. Il s’agit d’une infection rare de la peau et des tissus sous cutanés, se propageant le long des fascia (tissu qui enveloppe les muscles et les organes). Les origines de l’infection sont diverses. Elle peut provenir d’une plaie très banale. Dans le cas de Hanneman, une morsure d’araignée est évoquée. C’est probablement erroné, le diagnostic de la fasciite se révélant difficile, les araignées sont souvent mises en causes à tort. Les bactéries responsables de l’infection sont variées et souvent multiples, mais le streptocoque du groupe A (Streptococcus pyogenes) est souvent relevé. L’appellation de « bactéries mangeuses de chair », qui fit florès dans la presse à une époque, est usurpée : ces bactéries ne se nourrissent pas de la chair, mais libèrent des toxines mortelles pour les cellules vivantes conduisant à la nécrose.

Si vous présentez les symptômes suivants, inquiétez-vous :

  • Douleurs
  • Fièvre inexpliquée
  • Gonflement
  • Œdème dur et légèrement douloureux
  • Coloration rouge sombre et élévation de l’épiderme

Car ce qui arrive ensuite est particulièrement douloureux, rapide, et assez souvent mortel :

Rapidement, on assiste à la constitution de bulles remplies d’un liquide bleu tirant sur le violet. Par la suite, la peau devient fragile et prend une couleur tirant sur le bleu, puis sur le marron ou le noir. Dans un deuxième temps, l’infection est susceptible d’atteindre les aponévroses profondes (membranes fibreuses qui enveloppent les muscles en les séparant les uns des autres). Elle finit par donner une coloration gris foncé à la peau de la partie atteinte. A ce stade avancé, les patients présentent des signes toxiques et de choc qui traduisent une insuffisance de fonctionnement de plusieurs organes. Le choc, appelé également sepsis, correspond à une inflammation généralisée de tout l’organisme, et se traduit par une défaillance de tous les viscères qui n’assurent plus leur rôle normalement. (source : vulgaris-medical.com

Si vous tenez vraiment à voir les effets d’une fasciite nécrosante équipez-vous d’un sac à vomi et cliquez ici : Dead skin mask pour de vrai.

Le traitement est lourd et forcément médical et chirurgical : débridement de la peau (large incision pratiquée dans la zone infectée ; les médecins ont ouvert le bras de Jeff Hanneman du poignet à l’épaule), ablation des tissus nécrosés (morts), antibiothérapie, éventuellement oxygénothérapie,  greffes de peau (Hanneman y a eu le droit aussi).

 Tom Araya a déclaré que Slayer n’entrerait pas en studio tant que Hanneman ne serait pas rétabli à 100%. Rien ne dit que cela arrivera un jour. Le groupe avait jusqu’alors résisté aux tracas médicaux. En 2010, ce sont les cervicales de Araya qui lâchaient. Remède : une plaque en métal dans le cou. Et plus question de headbanger sur scène pour le chanteur-bassiste dont c’était la marque de fabrique… Un comble que Araya ait les honneurs de la rubrique headbanging science du bLoug finalement… Slayer, le groupe le plus violent du monde ? Pff, des mauviettes oui.

 

Pour tous vos problèmes de peau, une seule adresse : slayer.net

 

Dead Skin Mask – Lyrics: Araya | Music: Hanneman

Graze the skin with my finger tips
The brush of dead cold flesh pacifies the means
Provocative images delicate features so smooth
A pleasant fragrance in the light of the moon
CHORUS
Dance with the dead in my dreams
Listen to their hallowed screams
The dead have taken my soul
Temptation’s lost all control
Simple smiles elude psychotic eyes
Lose all mind control rationale declines
Empty eyes enslave the creations
Of placid faces and lifeless pageants
In the depths of a mind insane
Fantasy and reality are the same
Graze the skin with my finger tips
The brush of dead warm flesh pacifies the means
Incised members ornaments on my being
Adulating the skin before me
Simple smiles elude psychotic eyes
Lose all mind control rationale declines
Empty eyes enslave the creations
Of placid faces and lifeless pageants
CHORUS

 

qui a la plus grosse ? (hs#6 : PIXIES, Gigantic)

le headbanging science #6 ouvre le carnet rose et contraint le bLoug à enlever le bas : Gigantic ! S’exclame Kim Deal. Retour sur un autre morceau de choix des Pixies pour répondre à la question existentielle : qui a la plus grosse ?

headbanging science,la rubrique musicale des titres qui ont (presque) un rapport avec la science, #6 PIXIES – GIGANTIC


La video vintage est tirée du même concert que celle du headbanging science #5.

Gigantic est cosigné Black Francis / Kim Deal (sous son nom d’épouse, de manière ironique). Il s’inspire, selon Deal, du film Crimes of the Heart (Bruce Bersford, 1986), une nanardise typique des 80′s qui met en scène les aventures sentimentales de trois sœurs jouées par Jessica Lange, Diane Keaton et Sissy Spacek. L’une des héroïnes (Sissi Spacek) tombe amoureuse d’un éphèbe noir de 15 ans. Le morceau décrit les rêveries érotiques de Kim Deal en train d’assister aux ébats des deux tourtereaux.

Et c’est là que cela dérape… Gigantic + Black = Fantasme de l’étalon noir. Hormis une vague interprétation politiquement correcte des lyrics tentée un temps par Black Francis, les fans restent généralement sur la même version : Kim Deal se tape un bon délire sur les Noirs qui en ont une plus grosse…

N’en déplaise à quantité de sites Internet aux allures plus ou moins sérieuses, il semble bien qu’on ait affaire à une légende qui a le vit dur… directement héritée des représentations racistes qui ont pollué la science jusqu’au beau milieu du XXe siècle. Les études statistiques sur la taille du pénis humain semblent rares. Elles portent sur des échantillons souvent trop restreints ou trop spécifiques. Elles ne permettent certainement pas d’établir des comparaisons ethniques (si tant est que cela ait un sens). Elles présentent souvent des moyennes non relatives (essayez de faire le concours avec un cheval et vous trouverez certainement une vertu aux données rapportées à la  taille du corps). Et par dessus le marché, elles ne mesurent ni la même chose ni de la même façon.

Exemple de contre-information avec un site dont j’ai du mal à saisir le sens de la démarche (et dont je tairai le nom),  qui cartographie la taille du sexe d’une bonne partie de la planète. Le grand gagnant du jeu est la République démocratique du Congo. La France se classe à une honorable 17e place avec un bon 16,01 cm (c’est un peu mieux qu’à l’Eurovision). Les pauvres Sud-Coréens occupent la dernière position avec 9,66 cm (le bLoug ne compte pas encore de lecteur Sud-Coréen et espère vivement se faire des amis à cette occasion).

France, 17e rang mondial, 16,01 cm (pour les réclamations, voir avec l'Université d'Orléans apparemment)

Corée du Sud, 119e et dernier rang mondial : 9,66 cm, d'après on ne sait pas trop qui (peut-être des Nord-Coréens)

D’où viennent ces chiffres ? Sur quels échantillons portent-ils ? Quelles sont les marges d’erreur ? Est-ce que la République du Congo et la Corée du Sud n’ont vraiment rien de mieux à faire de leur budget recherche ? Mystère.

Mais le pire est à venir. En cherchant bien, on parvient à trouver quelques chiffres sérieux. Cette publication du British Journal of Urology compile quelques données issues d’autres études.

On se rend très vite compte que les échantillons (colonne ‘n’) ne permettent le plus souvent aucune analyse sur des sous-populations. Compte tenu de la variabilité physiologique de l’espèce humaine, les données moyennes des populations globales n’ont même pas de sens pour les échantillons les plus petits. Par ailleurs, le comparatif inter-études est souvent impossible en raison des différences méthodologiques : comment comparer des données déclaratives et les mesures effectuées en vrai (la précision n’est pas fournie ici mais on trouve les deux types de méthodes dans ce genre d’enquête et les moyennes reposant sur du déclaratif sont, comme par hasard, toujours plus élevées que les moyennes mesurées par des mains innocentes) ? Mieux, comment comparer de vaillants pénis en érection à de mollassons pénis au repos ?

Ca n’a évidemment ni queue ni tête, ce qui devrait redonner un bon coup de fouet à nos amis Sud-Coréens.

La dernière ligne du tableau concerne précisément une étude Sud-Coréenne. On y voit que la taille du pénis de 123 Sud-Coréens est de 9,6 cm… soit à un poil pubien près le chiffre cité tout à l’heure (9,66 cm)… sauf qu’il s’agit d’une mensuration au repos ! On a maintenant compris d’où viennent les données du site mentionné plus haut. Ils se contentent de les piquer à droite à gauche, sans se poser la question de ce qu’elles signifient, et encore moins de savoir si elles sont comparables. Et voilà comment les Sud-Coréens sont bombardés plus petites bites de la planète sans avoir jamais rien demandé…

Pour le coup, ce n’est plus tellement gigantic mais franchement affligeant. Pour réconcilier tous nos pénis, on se consolera avec cette citation extraite de l’article du BJU cité précédemment :

The issue of attractiveness to women is complex, but most data suggest that penile size is much lower down the list of priorities for women than such issues as a man’s personality and external grooming.

Hey Kim, le bLoug a une grosse personnalité !

Kim Deal, pro du manche

Gigantic (mrs John Murphy & Black Francis)

And this I know:
His teeth as white as snow
What a gas it was to see him
Walk her every day into a shady place
With her lips she said,
“Hey, Paul, hey Paul, hey Paul
Let’s have a ball”
Gigantic, gigantic, gigantic
A big, big love
Lovely legs, they’re a
What a big black mess
What a hunk of love
Walk her every day into a shady place
He’s dark, but I’d want him
“Hey, Paul, hey Paul, hey Paul
Let’s have a ball”
Gigantic, gigantic, gigantic
A big, big love